AU VENDEUR L’INTELLIGENCE, AU DIGITAL L’ARTIFICIEL


A l’heure de l’intelligence artificielle, la conquête de parts de marché pour un retailer ne passerait-elle pas par cette bonne vieille recette : l’expertise du vendeur ?

LA CONVERSION PASSE PAR LA CONVERSATION

Ah, le vendeur. Dieu sait si l’industrie du retail l’aura maltraité, voire oublié ces dernières décennies. On lui a dit que les consommateurs arrivaient plus experts que lui en magasin. On a créé des bornes pour compenser ses pseudos faiblesses. On a testé des robots vendeurs. Ces dernières années on a même créé des bots sensés guider bien mieux, bien plus intelligemment, bien plus efficacement, vers le bon produit. Et au final, on lui a donné toujours plus de tâches mécaniques sans aucun appel à son intelligence et à sa culture produit.

Le vendeur a vu le retail passer son énergie à vouloir compenser ses faiblesses sans jamais investir sur lui. Il est devenu un coût, plus un actif. Bien sûr, on vous imagine froncer les sourcils, vous trouvez ça un brin exagéré. Mais soyons honnêtes : Combien de retailers affirment à leur force de vente en pleine convention annuelle que ce sont eux qui font l’entreprise sans réellement y croire ? Combien ont mis en place « automatiquement » un projet de formation, parce que tout bon Directeur Général se doit d’avoir un plan pour montrer qu’il fait évoluer l’entreprise ? 

L’édition 2018 de l’étude Conquest nous rappelle brutalement que le meilleur levier de transformation reste la conversation. Et que la principale arme du mortar pour exister demain par rapport à l’ogre Amazon reste là aussi cette vieille recette : le vendeur.

En dépit de l’arsenal de moteurs de recommandations, de comparateurs et autres bots déployés par les pure players digitaux, la compétence attribuée à priori aux vendeurs des enseignes physiques dépasse dans toutes les catégories étudiées, et de très loin, les capacités de recommandation attribuées à priori aux enseignes digitales.

Même le roi de la recommandation subit cette loi, puisque dans ses catégories historiques, les produits électroniques et les produits culturels, à peine 10 à 18 % des non fréquenteurs d’AMAZON lui attribuent des capacités de conseil et de recommandation d’achat. Des recommandations sur lesquelles les Français restent très suspicieux puisque 92% d’entre eux pensent que les avis clients ne sont pas tous authentiques, selon l’enquête Trusted Shops 2018.

20 FOIS MIEUX

En regard de cela, toutes les études montrent que les consommateurs sont plus susceptibles de passer à l’acte d’achat une fois qu’ils ont été conseillés par un vendeur spécialisé. Selon Xerfi, le taux de transformation serait même vingt fois meilleur en boutique qu’en ligne. Il est frappant du reste de voir qu’une industrie comme l’automobile, où le vendeur de voiture est souvent caricaturé comme un opportuniste ignorant, évolue grandement puisque Mini ou BMW appliquent à leurs points de vente ce qu’Apple a appliqué aux siens : des products genius, formés, entraînés, considérés par leur entreprise, sont dédiés à l’expertise produits et déconnectés de l’acte même de vente pour apporter au consommateur ce qu’il attend : une conversation plus qu’un exercice de vente.

L’étude Conquest nous rappelle une autre vérité brutale : La compétence perçue des vendeurs est un levier de croissance phénoménal puisqu’elle est étroitement corrélée avec l’envie d’acheter. Indépendamment de la catégorie, les deux premières enseignes en réputation de compétence des vendeurs sont ainsi toujours les leaders de leur catégorie sur l’envie d’acheter en magasin. Et pour certains c’est un levier de conquête incroyable : 57 % des non-fréquenteurs de DECATHLON estiment que ses vendeurs sont compétents, 55 % pour LEROY MERLIN, 54 % pour SEPHORA. Que des retailers puissants et en forme, qui sont aussi des « Best places to work » dans l’industrie.

L’avenir le dira, mais il est fort à parier que les retailers qui resteront droits dans leur bots sans investir dans l’humain en paieront les frais. Et plus que jamais, investir sur le vendeur, l’associer aux actions de l’entreprise, le traiter en ambassadeur aura un impact sur la transformation.